Déménagement du siège social de Worldline

Afin de réduire les couts des loyers (baisse de plusieurs millions d’euros annuel), la direction envisage de déménager les sites de Bezons, Paris Grenelle, une partie du site de Suresnes, potentiellement vers la Défense. Selon la direction, Bezons reste une option envisageable.

1 251 salariés (effectif prévisionnel) seraient accueillis sur un espace total inférieur avec moins de postes de travail.

Comment caser 1 251 salariés dans moins de m2 ? Le Covid a encore bon dos !!!

Sous prétexte que le télétravail sera amené à croître après la crise sanitaire du covid-19, ce déménagement entrainerait la mise en place du « Desk Sharing » ou « Flex Office »

C’est avec force anglicismes et néologismes que patronat et cabinets spécialisés dans l’aménagement de bureau, nous abreuvent d’une nouvelle organisation de l’espace de travail. La sauce du « Flex » semble s’accommoder avec tout dans le secteur tertiaire. Ainsi, flexibilité du temps de travail, flexibilité de l’emploi pourraient se conjuguer à merveille avec le Flex-Office. Tout cela n’étant qu’une histoire de Flex…

Le bureau paysagé a laissé place à l’Open Space depuis quelques décennies. 29 % des salariés en France travaillent en Open Space. Ils ne sont que 6 % à connaître le Flex-Office. Il est vrai, celui ci est relativement récent et encore peu répandu. Pour autant, le développement rapide de ce mode d’organisation dans les services tertiaires ne peut qu’interroger sur l’importance de cette nouvelle conception des espaces de travail et sur ses conséquences pour les salariés.

 Flex-Office., Flex-Work, Flex-Desk, Desk-Sharing

On trouve beaucoup d’expressions pour évoquer exactement une même réalité, la flexibilité des espaces de travail.

Mais de quoi s’agit-il exactement ?

En fait, que ce soit l’espace de travail flexible ou postes partagés, ces notions recouvrent un même principe d’organisation dans laquelle tout salarié n’a pas de poste de travail fixe affecté.

De ce principe découlent plusieurs conséquences organisationnelles

  • Le partage d’un même poste entre plusieurs utilisateurs à différents moments.
  • L’obligation de ranger (Clean-Desk) ou de libérer (Clear-Desk) le poste de travail, au moins journellement, voire lors de chaque absence prolongée.
  • La dotation d’armoires de rangement ou de casiers individuels et collectifs.
  • La dotation d’outils individuels et collectifs favorisant la mobilité, principalement ordinateur portable et matériels de téléphonie dédié.
  • La création de différents espaces dans les bureaux équipés d’outils digitaux.

Ce principe est rarement décliné de façon universelle et totale. En effet, cela conduirait concrètement à un éclatement permanent des collectifs et à des pratiques de type « premier arrivé, premier servi », amplifiées par la réduction progressive des places de stationnement, conformément à la réglementation urbaine environnementale.

 Sa mise en œuvre

Il est rare que les entreprises mettent en place, dans sa globalité, cette nouvelle organisation de l’espace de travail. Elles la modulent de plusieurs façons.

D’abord en attribuant aux services, entités ou activités des zones définies d’un plateau ou d’un étage de façon à préserver l’intégrité des collectifs sous couvert de vocables tendances tels que « villages, îlots, clusters, hubs… ».

Ensuite en faisant des exceptions au « tout Open Space » dans lequel s’inscrit naturellement le Flex-Office, avec des bureaux fermés réservés à quelques « happy few » (les salariés qui mettent en œuvre ces Flex Office en font partie) , mais aussi des postes de travail plus ou moins affectés dans les espaces ouverts.

 Organisation de l’espace / Organisation du travail

Il ne s’agit pas seulement d’une organisation spatiale. Le Flex-Office est aussi une organisation du travail qui repose sur une « diversification » des solutions de travail « à la carte », proposées aux salariés.

La flexibilité demandée aux salariés pour l’occupation des postes de travail se complète d’une flexibilité résultant de la variété des solutions proposées et des espaces de travail mis à disposition : Fab Labs, isoloir, face à face…

Les positions de travail dans ces différents espaces aménagés au sein des plateaux ou des étages des nouveaux immeubles sont souvent comptabilisées comme des postes de travail à part entière dans les calculs des surfaces et dans la communication faite aux salariés. Il y a en plus une volonté d’économie. De 12 500€ à 15 000€ par an, tel est le chiffrage du coût d’un poste de travail en région parisienne. Notons que c’est le deuxième poste par son poids après les charges de personnel dans les entreprises du tertiaire : l’immobilier et les charges qui y sont liées pèsent ainsi jusqu’à 17 % des dépenses d’exploitation des entreprises. Le Flex-Office dans ce cadre est une réponse organisationnelle à l’optimisation recherchée des surfaces.

 Des économies sur les dépenses énergétiques

La réduction des surfaces permise par cette approche facilite la réponse des entreprises à l’exigence de réduction de leur facture énergétique. Elle facilite, problème de place aidant, l’évolution des organisations vers le zéro papier. En fait, elles se drapent derrière des «  conséquences collatérales vertueuses » pour mieux faire passer le Flex-Office.

 Les enjeux de digitalisation du travail

La problématique du Flex-Office ne se résume pas à des seules considérations économiques pour autant prépondérantes dans les décisions. En effet, avec la digitalisation, l’environnement de travail a changé. Ainsi, alliée à des outils adaptés, elle permet une forme de nomadisme à l’intérieur, on peut travailler partout, et à l’extérieur de l’entreprise, avec des réponses comme notamment le télétravail.

 Travail collaboratif et bien-être

Le Flex-Office veut prendre en compte la transformation du travail et apporte des réponses. Même s’il est clair que les besoins liés à la nature du travail se sont diversifiés avec notamment le développement du travail collaboratif, d’espace de partage… la réponse Flex-Office se fait dans le cadre d’une recherche de standardisation des équipements et des aménagements, permettant des économies d’échelle sur les projets. Pour mieux faire passer le Flex-Office, les entreprises intègrent souvent dans leurs projets une dimension « Qualité de Vie au Travail » avec des espaces réservés à la détente, à l’échange… dont les aménagements concourent à l’image de « modernité » et de « jeunesse » de l’entreprise.

Nous savons que l’implantation en Open Space présente des risques potentiels : phénomènes de nuisances sonores et visuelles, troubles de la concentration et tensions interpersonnelles ; ainsi que des stratégies de contournement adoptées par les salariés, depuis le télétravail à l’isolement au sein des collectifs (port de casques audio, privatisation des petits espaces collectifs fermés).

 La perte de repères

La perte de repères qu’entraîne la nécessité quotidienne de trouver un bureau et un poste pour chaque journée, voire pour chaque période de travail, peut mettre le salarié en difficulté. Le choc culturel est souvent opérationnel. La tranche 24-35 ans s’adapte plus facilement à ce type de configuration.

Marie Pezé, psychanalyste, spécialiste de la souffrance au travail, souligne s’il en était besoin : « à un salarié de s’installer tous les jours dans un nouvel espace de travail, pas au même étage, pas avec les mêmes personnes, cela va représenter un stress, une fatigue supplémentaire ».

Danielle Linhart, sociologue du travail, ne dit pas autre chose quand elle affirme que, dans ce type d’environnement de travail, chaque journée devient une épreuve. Cette déstabilisation est souvent le résultat d’une stratégie de management où le collectif de travail est en perpétuelle reconfiguration.

 L’adaptation

La standardisation de l’organisation en Flex-Office et des équipements, voire les contraintes posées par des règles de vie collectives adoptées pour un nouveau site, conduisent inévitablement à demander aux salariés de s’adapter à leur environnement et non l’inverse.

 Une perte de temps et d’efficacité

Le temps perdu à rechercher un poste, y poser ses affaires, se connecter, régler le siège, voire le plan de travail, débarrasser, ranger dans des casiers de taille souvent réduite font parties des désagréments qui interrogent l’utilité du Clear-Desk. Ce type d’organisation amplifie les stratégies de contournement adoptées par les salariés pour en compenser les inconvénients visibles : arriver plus tôt pour avoir un parking, choix de l’un des postes souhaités, sédentarisation rampante, privatisation d’espaces destinés à des réunions…

De plus, les rotations inter journalières favorisent la propagation des germes infectieux entre salariés, notamment dans les cas de virus saisonniers ou du COVID…

En effet, les plans de travail et les équipements ne sont pas nettoyés entre deux utilisateurs se succédant. Et les salariés ne disposent pas en général des moyens pour procéder à leur nettoyage. La situation peut être encore plus préoccupante lorsque certains outils de travail incontournables sont affectés au poste de travail et non à son occupant : clavier, souris, téléphone… On notera sur ce sujet que le nettoyage des casiers personnels est rarement envisagé. Pourtant, ils le nécessitent aussi.

 L’absentéisme

Les études menées sur les Open Space, dont l’étude SteelCase, avec la participation de scientifiques et de médecins, ont montré qu’ils favorisaient la propagation des maladies infectieuses, au travers notamment du constat d’un absentéisme pour maladie, sensiblement plus important que celui des salariés en bureau individuel. La mobilité et le nomadisme des salariés découlant du Flex-Office sont des éléments potentiellement aggravants.

 CSE/CSSCT

L’enjeu est de taille puisqu’il s’agit de peser sur ce type de projet. Lors d’informations consultations du CSE (Comité Social et Economique), il ne faut pas hésiter à déclencher une expertise concernant les concepts d’aménagement, la future implantation des entités et des services, l’aménagement des espaces et des postes de travail, le choix du mobilier et des équipements…

Source : Lien Syndical de la Fédération CGT des Sociétés d’Etudes

 

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